Les cystides des hyménomycètes

Classé dans : Microscopie | 5

par Guy Fortin

avec la collaboration de Roland Labbé

Dans cette chronique sur la microscopie, Guy Fortin nous présente la terminologie employée pour décrire les cystides, ces cellules spécialisées dont le rôle est mal connu, mais qui s’avèrent utiles dans la détermination des espèces.

 Note de l’éditeur : la figure 4 a été modifiée le 15 janvier 2019

Les cystides (du grec ancien kystis : vessie) sont des articles d’hyphes, terminaux et spécialisés, qu’on retrouve dans le basidiome de plusieurs hyménomycètes. Elles diffèrent des autres articles par leur forme, leur dimension, la structure de leur paroi ou par leur cytoplasme. Ce sont des cellules stériles, aux fonctions probablement d’excrétion ou de sécrétion, de support et de protection. Elles prennent des noms différents suivant leur localisation et leur morphologie. La plupart sont localisées dans l’hyménium ou à la surface du pileus ou du stipe, mais certaines peuvent être enfouies dans le contexte du basidiome.

Pour décrire les cystides, on utilise une terminologie topographique ou morphologique ou les deux ensembles pour plus de précision. Ainsi, une cheilocystide est une cystide située à l’arête d’une lame (terme topographique); une lamprocystide est une cystide à paroi épaissie (terme morphologique) et une cheilolamprocystide est une cystide à paroi épaissie située à l’arête d’une lame.

À l’origine, les cystides ont été considérées comme étant des cellules situées uniquement dans l’hyménium, jusqu’à ce que soient décrites les cystides de la surface du chapeau et du pied.

Terminologie appliquée aux cystides

1- Terminologie topographique

Suivant la terminologie topographique, les cystides sont décrites en fonction de leur localisation sur le basidiome. On distingue les

  • Dermatocystide* (derma = peau) située sur la surface du chapeau des agarics.
  • Piléocystide* (pileus = chapeau) située sur ​​la surface du chapeau.
  • Pleurocystide (pleura = côté) située sur la face des lames (cystides faciales).
  • Cheilocystide (cheilos = lèvre) située sur l’arête des lames (cystides marginales).
  • Caulocystide (kaulos = stipe) cystide située sur la surface du stipe.
  • Endocystide (endon  =  dans) cystides complètement enfermées dans le contexte, provenant du contexte ou incluses dans le contexte par épaississement du sous-hyménium

*Les termes piléocystide et dermatocystide sont synonymes.

2- Terminologie morphologique

Suivant la terminologie morphologique, les cystides sont décrites selon leur apparence en microscopie optique et leur comportement dans les colorants et les réactifs. Elles sont divisées en deux groupes selon l’apparence de leur cytoplasme :

  • les Deutérocystides dont le cytoplasme est formé de dépôt de métabolites secondaires et qui a une apparence qui va d’homogène à hétérogène, d’aqueuse à gélatineuse ou cristallisée et qui est plus ou moins ferme
  • les Aléthocystides dont le cytoplasme est homogène, clair, transparent.

On retrouve, en annexe, un tableau récapitulatif de la classification des cystides en fonction de leur morphologie.

Classification et catégories de cystides

L’apparence des cystides au microscope optique et leur comportement dans les colorants et les réactifs sont la base de la terminologie et de la classification des cystides.

D’autres éléments, tels que pseudocystides, poils, soies, cellules en brosse ou diverticules sont possibles sur les lames et également sur le chapeau ou le pied.

La terminologie actuelle comprend plusieurs termes inutiles qui entraînent de la confusion et des contradictions. Clémençon (2012) propose une terminologie qui tente de trouver un consensus raisonnable.

Note : La visualisation des éléments hyméniaux ou de l’arête lamellaire n’est pas toujours facile chez les espèces à sporée foncée, les spores venant obscurcir la préparation. Pour débarrasser le fragment de lame d’une grande partie de ses spores, la méthode de Kits van Waveren est efficace :

1- Recouvrir le fragment d’ammoniaque à 10 %

2- Agiter le fragment dans ce milieu, ce qui détache les spores qui flottent dans la           solution

3- Utiliser du papier absorbant pour supprimer cette  » suspension sporale  »

4- Renouveler plusieurs fois les étapes 1 à 3

Trois catégories de cystides sont retenues (Fig. 1) :

1- Les cystides. Elles sont divisées en deux groupes :
  • les deutérocystides avec un contenu cellulaire deutéroplasmatique
  • les aléthocystides avec un contenu cellulaire euplasmatique.

Ces deux groupes peuvent être à paroi mince ou à paroi épaissie et la paroi peut être nue ou recouverte de cristaux, d’un mucilage ou d’une substance résineuse.

Il faut faire attention à ne pas confondre les cystides et les pseudocystides, surtout lorsque le contenu cellulaire est deutéroplasmatique.

2- Les pseudocystides.

Ce sont des hyphes deutéroplasmatiques, non septées, provenant de la trame lamellaire, courbant et pénétrant dans l’hyménium.

Ces pseudocystides peuvent côtoyer les cystides dans plusieurs champignons.

3- Les hyphidies.

Ce sont des éléments protecteurs de l’hyménium de certains champignons aphyllophorales, formant une couche dense et fermée, recouvrant complètement les jeunes basides.

Le terme hyphidie, appliqué aux articles hyméniaux protégeant les jeunes basides a remplacé tous les termes se terminant par « -physe », soit acanthohyphidie, dendrohyphidie et dichohyphidie.

Le terme dichofibre est créé pour désigner de très longues hyphes fibreuses et ramifiées dichotomiquement dans certains champignons corticioïdes.

Fig. 1. Trois catégories de cystides : les cystides (à gauche en bleu), les pseudocystides (au centre en vert) et les hyphidies (à droite en jaune). © Guy Fortin

Fig. 2. Schémas morphologiques des cystides

Fig. 2. Schémas morphologiques des cystides. © Guy Fortin

Fig. 3. Schémas morphologiques des cystides (suite)

Fig. 3. Schémas morphologiques des cystides (suite). © Guy Fortin

Fig. 4. Exemples typiques de cystides de genres lamellés

 

Glossaire

  • Aléthocystide : cystide dont le cytoplasme est homogène, clair, transparent .
  • Deutérocystide : cystide dont le cytoplasme est semblable à un deutéroplasme
  • Deutéroplasme : cytoplasme formé par le dépôt de métabolites secondaires, qui a une apparence variant d’homogène à hétérogène, d’aqueuse à gélatineuse ou cristallisée, et qui est plus ou moins ferme. C’est le cytoplasme des hyphes sécrétrices.
  • Deutéroplasmatique : dont le cytoplasme est un deutéroplasme

Références

  • Labbé, R. (2017). Initiation à la microscopie des Basidiomycètes lamellés. Notes de cours pour les ateliers de microscopie du Cercle des mycologues amateurs de Québec
  • Clémençon, H. (2012). Cytology and Plectology of the Hymenomycetes (2e éd.). Stuttgart: J. Cramer
  • Largent, D., Johnson, D., Watling, R. (1977). How to Identify Mushrooms to Genus III: Microscopics Features. CA, É.-U.: Mad River Press Inc.
  • Glossaire mycologique de Mycoquébec : mycoquebec.org
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5 Responses

  1. Suzanne béland

    Bravo! C’est très écalirant. Cette info m’aide à mettre en ordre mes notions de microscopie en mycologie.

  2. Bionne

    Félicitation pour ce travail remarquable et ces magnifiques schémas morphologiques. vraiment éclairant comme le dit Suzanne.

  3. PIERRE ROUX

    Très bon travail, juste une divergence sur votre conception de la cystide en brosse qui pour moi a des excroissances courtes et de même longueur, votre représentation est celle d’une cystide diverticulée. Bonne année à vous tous. PIERRE ROUX

    • Guy Fortin

      Vous avez raison, le dessin de la cystide en brosse de la figure 4 est bien un dessin de cystide diverticulée. Je vais corriger ça.

      Merci pour votre remarque et Bonne année à vous.

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