Récemment Herman Lambert et des collaborateurs ont publié dans « Fungal Systematics and Evolution » une description inédite de 11 espèces d’amanites dont les holotypes proviennent tous du Québec. Portant jusqu’à récemment des noms provisoires, ces 11 amanites décrites par les auteurs font maintenant partie de la grande fonge internationale.
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Voici une courte présentation de chacune d’elles.
Amanita cingulatoides / Amanite ceinturée
[H. Lambert, J. Landry]

Elle tire son nom du latin cingulatus, ceinturé, annelé, et du suffixe -oides, ressemblant, similaire à, en référence à sa ressemblance avec son espèce sœur annulée Amanita cingulata.
L’holotype a été récolté dans une forêt mixte au sol argileux de la ville de Québec par Herman Lambert. Jusqu’à maintenant, on ne retrouve cette Amanite que dans la région de Québec.
Il s’agit d’une espèce à chapeau blanc à crème qui devient brun jaunâtre avec l’âge, orné de verrues ou de petites taches laissées par un voile universel friable et laineux. La marge du chapeau est plus pâle et striée sur 20-30 % du rayon. Les lames sont libres, serrées, à arête floconneuse. Le pied est subcylindrique ou légèrement rétréci vers le haut, fibrilleux à floculeux, souvent avec un motif zébré mieux visible entre l’anneau et l’apex. L’anneau est membraneux, mince, fugace. La chair est mince et blanche, devenant légèrement brunâtre lorsqu’elle est coupée ou meurtrie. L’odeur est indistincte, la sporée blanche.
Amanita confundens / Amanite confondante
[H. Lambert, Y. Lamoureux, J. Landry]

L’Amanite déroutante, confondante, est ainsi nommée en référence à son chapeau de différentes couleurs dans des tons de blanc, de gris à gris brunâtre.
L’holotype a été récolté par Herman Lambert dans un boisé de la ville de Québec à sol argileux et à dominance de chênes et de hêtres. Solitaire ou dispersée, on la trouve de juillet à septembre.
Elle se distingue par son chapeau de couleur variable, gris à gris brunâtre, plus foncé au disque ou blanc à teinte gris jaunâtre pâle au disque, avec quelques restes vélaires. La marge est longuement striée sur 30 à 60 % du rayon du chapeau. Les lames sont libres, serrées, blanchâtres à saumonées lorsque jeune. Le pied est cylindrique à légèrement effilé vers le haut, légèrement fibrilleux, blanc et sans anneau. Le voile général est membraneux, blanc, fragile, laissant une volve sacciforme atteignant 40 mm de haut. Le contexte est blanc, immuable à la coupure ou à l’écrasement. L’odeur et goût sont non distinctifs. La sporée est blanche.
Amanita elongatior / Amanite élancée
[Y. Lamoureux, H. Lambert, R. Lebeuf, J. Landry]

L’épithète elongatior, plus longue, plus allongée, fait référence au long stipe typique de l’espèce.
L’holotype a été récolté à Boucherville, au Québec, par Renée Lebeuf et André Paul. Elle se présente en solitaire ou en petits groupes dans les sols riches, sous les chênes et les hêtres de juillet à septembre.
L’espèce est remarquable par sa robustesse et caractérisée par de grands basidiomes dont le diamètre du chapeau va jusqu’à 130 mm, il est glabre, brun foncé à brun jaunâtre, viscidule à l’humidité. Les lames sont un peu serrées, blanches ou saumonées. La marge est striée sur 15-45 % du rayon. Le long pied, jusqu’à 200 mm, a des fibrilles zébrées plus claires que le chapeau. Il est toujours profondément enfoui dans le sol. L’anneau est absent. Le voile général est membraneux, épais, coriace, blanc et forme une longue et épaisse volve sacciforme. Le contexte est blanc, immuable à la coupe ou à la meurtrissure. L’odeur est indistincte. La sporée est blanche.
Amanita fusca / Amanite sombre
[H. Lambert, R. Lebeuf, J. Landry]

Du latin fuscus, foncé, noir, sombre, en référence au chapeau brun foncé.
L’holotype a été récolté par Herman Lambert à Québec dans le boisé Neilson, dans un sol argileux à dominance de chênes rouges et de hêtres à grandes feuilles.
C’est une espèce solitaire ou en petits groupes qui pousse sous les feuillus de juillet à septembre au Québec, au Canada et dans les États du Maryland, du New Jersey, de Pennsylvanie et du Wisconsin aux États-Unis. Elle se distingue des autres espèces gris-brun de la section Amanita Vaginatae par son chapeau de taille moyenne aux couleurs brunes dominantes avec une marge plus claire, striée 20 à 50 % du rayon, ainsi que par son pied blanc à brunâtre, pruineux vers l’apex, et par son voile général membraneux laissant une volve blanche à la base du pied. Les lames sont libres, blanchâtres, subdistantes à serrées. L’anneau est absent. Le contexte est blanc, immuable et l’odeur indistincte. La sporée est blanche.
Amanita fuscozonata / Amanite zonée
[H. Lambert, R. Lebeuf, Y. Lamoureux, J. Landry]

Du latin fuscus, foncé, noir, sombre, et zonatus, ceinturé, zoné en référence aux zones gris-brun foncées présentes sur le chapeau.
L’holotype a été récolté par Herman Lambert à Québec dans le boisé Neilson sous les sapins baumiers, les chênes et les hêtres à grandes feuilles.
Cette Amanite se distingue des autres espèces gris-brun de la section Vaginatae par son chapeau de taille moyenne, brun grisâtre avec une zone plus pâle à mi-rayon. La marge est striée sur 30 à 50 % du rayon. Les lames sont libres, subdistantes à serrées, blanchâtres à crème. Le pied s’amincit vers le haut, il est finement couvert de fibrilles blanches, devenant brun clair avec l’âge et formant ou non un motif zébré. Le voile général est membraneux, blanc, fin, fragile, laissant une volve sacciforme de 20-40 mm de haut, adnée à la base, évasée au-dessus. L’anneau est absent. Le contexte est blanc, immuable à la coupe ou à la meurtrissure. L’odeur est non distinctive et la sporée est blanche.
Amanita leptorhacopus / Amanite mini-rhacopus
[R. Lebeuf, H. Lambert, J. Landry]

Du grec ancien λεπτός (leptós), mince, ténu et rhacopus, pour sa ressemblance avec l’Amanita rhacopus qui est plus robuste
L’holotype a été récolté au Québec, à Sainte-Anne-de-Bellevue, pas Renée Lebeuf et André Paul dans une forêt de divers feuillus.
On la trouve en petits groupes, dans des sols riches de forêts de feuillus ou mixtes, en juillet et août. Actuellement, sa présence est confirmée dans le sud du Québec, dans la vallée du fleuve Saint-Laurent et dans les États du Maine et de New York aux États-Unis.
Son chapeau convexe puis aplani à petit umbo bas est gris brunâtre à brun. Il est couvert de petites taches provenant du voile général. La marge est plus claire et striée sur 30-40 % du rayon. Les lames sont libres, blanchâtres, floconneuses à l’arête. Le pied s’amenuise vers l’apex et possède généralement un petit bulbe arrondi à la base. Le voile général est friable, se décomposant en plages lâches à la surface du chapeau et à la base du pied, d’abord blanchâtres puis gris à gris brunâtre, devenant plus brunes à la surface du chapeau avec l’âge. Il n’y a pas d’anneau et le contexte est fragile, mince, blanc, immuable à la coupure ou à la meurtrissure. Elle est sans odeur et a un goût doux. La sporée est blanche.
Elle se distingue d’Amanita rhacopus par son port plus élancé, son chapeau gris plus pâle et un petit bulbe rond sur le pied.
Amanita magna / Amanite élevée
[H. Lambert, Y. Lamoureux, J. Landry]

Du latin magna, signifiant grand, en référence à la grande taille des basidiomes
L’holotype a été récolté dans le boisé Neilson, dans la ville de Québec par Herman Lambert sous les sapins baumiers, les chênes et les hêtres à grandes feuilles.
Il s’agit d’une espèce solitaire ou grégaire caractérisée par sa grande taille dont le chapeau fait jusqu’à 140 mm de diamètre et le pied jusqu’à 330 mm de longueur. Le chapeau est glabre, gris-brun, souvent avec une zone plus claire entre le centre ombonné et les stries marginales qui occupent 30-40 % du rayon. Les lames sont libres, serrées, blanchâtres à brunâtres, jusqu’à 10 mm de large. Le pied est cylindrique à légèrement effilé vers le haut, recouvert entièrement ou partiellement de fibrilles denses brun grisâtre zébrées avec l’âge. L’anneau est absent. Le voile général est membraneux, blanc et forme une volve sacciforme de 30 à 60 mm de long presque entièrement enfouie dans le sol. Le contexte est blanc, immuable à la coupe ou au froissement. L’odeur et le goût sont indistincts. La sporée est blanche.
L’espèce est présente au Québec et peut-être aux États-Unis dans les états du Connecticut, du Kentucky, de New York, de la Caroline du Nord et de la Virginie.
Amanita olivaceodisca / Amanite olivacée
[R. Lebeuf, A. Paul, J. Landry]

Du latin oliva, olive, olivier et discus disque, chapeau par extension, en référence à la couleur olivâtre fréquente au centre du chapeau.
L’holotype a été récolté par Renée Lebeuf et André Paul au Québec, au Parc nature « La Gabelle » à Notre-Dame-du-Mont-Carmel, dans une forêt mixte formée de pruches du Canada, de peupliers à grandes dents, de hêtres à grandes feuilles et de chênes rouges dans un sol argileux. Sa présence a été confirmée jusqu’à présent dans le sud du Québec, et dans les États de Floride, d’Indiana, du Michigan, de Caroline du Nord et de Pennsylvanie aux États-Unis.
Cette Amanite se distingue des autres espèces d’Amanita section Vaginatae par son chapeau de couleurs variées très souvent avec une teinte olive au disque. Il est souvent
ombonné, légèrement viscidule, glabre ou parfois avec des restes vélaires. La marge est striée sur 25-35 % du rayon. Les lames sont libres à arêtes floconneuses. Le pied est floconneux blanc et développe une teinte orange grisâtre avec l’âge. Le voile général est blanc et forme une volve sous-membraneuse à la base du pied. L’anneau est absent. Le contexte est fragile, fin, blanc, immuable à la coupe ou à la meurtrissure. L’odeur est désagréable à la base du pied ou absente et le goût doux. La sporée est blanche.
Amanita piceina / Amanite des épinettes
[H. Lambert, J. Landry]

Du latin picea, épinette et -ina, suffixe pour relatif à, en référence à sa relation avec cet arbre.
L’holotype a été récolté par Herman Lambert, à Lévis, dans une plantation d’épinettes. C’est une Amanite qui pousse en solitaire ou en petits groupes dans les sols acides, de juillet à septembre. Elle est connue du Québec et de Terre-Neuve-et-Labrador au Canada, et des États du Maine et du New Hampshire aux États-Unis.
Elle se caractérise des autres espèces d’Amanita section Vaginatae par sa croissance sous les épinettes, par ses grands basidiomes, son chapeau brun jaunâtre à brun terne, glabre et parfois zoné, par son pied avec des fibrilles concolores au chapeau et zébrées.
La marge du chapeau est striée sur 10-40 % du rayon. Les lames sont serrées, blanchâtres à orange pâle. Le pied s’effile vers l’apex et est profondément enfoui dans le sol. Il n’a pas d’anneau. Le voile général est membraneux, épais, coriace, blanc et forme une volve sacciforme longue et épaisse. Le contexte est blanc, immuable à la coupe ou à la meurtrissure. L’odeur est indistincte. La sporée est blanche.
Amanita pulla / Amanite obscure
[R. Lebeuf, H. Lambert, J. Landry]

Du latin pullus, gris foncé, sombre, en référence à la couleur du chapeau.
L’holotype a été récolté par Renée Lebeuf et André Paul, à Sainte-Anne-de-Bellevue, au Québec, sous divers feuillus, chênes rouges, charmes de Caroline.
L’espèce pousse de façon isolée ou en petits groupes de juillet et août. En plus du Québec, sa présence est confirmée jusqu’à présent dans l’Indiana, l’État de New York et la Pennsylvanie aux États-Unis.
Cette Amanite se distingue par son chapeau gris foncé à gris brunâtre à gris clair avec un centre foncé, la marge est concolore et striée sur 25-40 % du rayon. Les lames sont libres, serrées, blanchâtres, floconneuses à l’arête. Le pied est blanc devenant brun au moins à la base avec l’âge ou lorsqu’il est meurtri. Le voile général est membraneux, blanc avec des parties orange-brun pâle laissant une volve sacciforme à la base du pied. L’anneau est absent. Le contexte mince, blanc, immuable à la coupe ou à la meurtrissure. L’odeur est indistincte ou désagréable. Le goût est doux. La sporée est blanche.
Amanita quercifulva / Amanite fauve des chênes
[R. Lebeuf, H. Lambert, A. Paul, J. Landry]

Du latin quercifulva pour Quercus (le chêne) et fulva (fauve, jaunâtre) en référence à sa similitude avec Amanita fulva Fr. et son association particulière avec les chênes.
L’holotype a été récolté par Renée Lebeuf et André Paul à Boucherville, au Québec.
Cette Amanite pousse en solitaire ou en petit groupe dans des forêts de feuillus (chêne rouge, caryer ovale, charme de Caroline, bouleau). Elle est probablement associée aux chênes. Jusqu’à présent elle est connue du Québec et des États de l’Arizona, du Connecticut et de la Pennsylvanie aux États-Unis.
Elle se distingue par son chapeau jaune orangé, plus foncé au centre et souvent plus pâle à mi-rayon et sans reste vélaires. La marge est droite devenant réfléchie avec l’âge et striée sur 35-40 % du rayon. Ses lames sont libres, serrées et blanches. Son pied s’effilant vers l’apex, blanc-floconneux à l’apex, est recouvert de courtes fibrilles blanches vers la base, formant souvent un motif zébré sur fond jaune orangé. L’anneau est absent. Le voile général est membraneux, blanc, laissant à la base du pied une volve sacciforme, adnée au tiers inférieur et évasée au-dessus, qui se colore en orange brunâtre avec l’âge. Le contexte est blanc, immuable à la coupure ou à la meurtrissure. Son odeur est indistincte, son goût doux et la sporée blanche.
Glossaire
Contexte : chair des champignons à chapeau
Droit : se dit des marges du chapeau, ne comportant aucune courbure
Épinette : au Québec, nom donné à l’Épicéa commun (Picea abies) en référence aux aiguilles épineuses, piquantes
Holotype : premier spécimen ayant servi à la typification précise d’une espèce
Réfléchi : se dit de la marge du chapeau courbée vers le haut
Strié : région du chapeau marquée de lignes régulières
Restes vélaires : débris du voile général présents sur le chapeau
Voile général : membrane qui enveloppe initialement tout le champignon et qui persiste parfois sous forme de volve
Zébré : portant des zébrures, marques allongées, raies, sur une surface
Collaborateurs :
Herman Lambert, Guy Fortin, Yves Lamoureux, Jacques Landry, Renée Lebeuf, André Paul :
Mycoquébec, 1313 rue Louis-Francoeur, Québec, QC G1Y 1N7, Canada
Jean-Marc Moncalvo :
Department of Natural History, Royal Ontario Museum & Department of Ecology and Evolutionary Biology, University of Toronto, Ontario M5S 2C6, Canada
Guy Fortin avec la collaboration de Herman Lambert
Décembre 2024
Jean Paul Cariou
Bonjour,
Ce document est fort intéressant même pour un amateur comme moi. Les coupes microscopiques donnent à penser qu’il existe des similitudes intéressantes avec les interconnections entre les neurones et celles des interconnections racinaire des champignons et de leur symbiose avec le réseau racinaire des arbres.